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Le nouveau rôle des grands-parents, en France et à l’étranger

Publié le01-06-2017

Quand nous avons téléphoné à la sociologue Martine Segalen* pour l’interviewer, elle nous a fait cette réponse : « Ma fille vient de rentrer, je veux passer un peu de temps avec elle. Je vous rappelle quand elle sera partie ! ». De la part d’une spécialiste de la famille, on n’en attendait pas moins…

Martine Segalen, reconnue pour ses travaux sur le rôle des grands-parents, a été l’une des premières à étudier ce « nouvel âge de la société » que sont les jeunes retraités. « Le vieillard assis sur une chaise, la grand-mère faisant des confitures … C’est fini ! ». Aujourd’hui, les grands-parents emmènent leurs petits-enfants faire du ski, au théâtre ou à des concerts. Ils participent à leur éducation.

Si, en France, l’éducation à proprement parler continue d’incomber aux parents plus qu’aux grands-parents, les variations sont grandes d’un pays à l’autre. « En Chine, par exemple,  les jeunes s’expatrient loin et il n’y a pas de garde d’enfants collective, explique Martine Segalen. Aussi, les mères laissent souvent leurs enfants chez leurs grands-parents qui jouent dès lors un véritable rôle éducatif ». Par ailleurs, détaille-t-elle, « les rapports entre les générations ne sont pas les mêmes qu’en Occident : l’obéissance patriarcale aux grands-parents est beaucoup plus forte ». Ainsi, les jeunes parents apprécient grandement de pouvoir confier leurs enfants à leurs grands-parents – une coutume culturelle qui permet au demeurant un emploi féminin massif.

« Si ce sujet est passionnant,  la sociologie a longtemps été réticente à s’intéresser à cet aspect de la famille, à la grand-parentalité », souligne Martine Segalen. Jusqu’à récemment, les seuls travaux français portant sur cette génération étaient consacrés au coût de la vieillesse. La recherche américaine a pour sa part davantage abordé ce thème, mais de manière très indirecte, à travers des travaux spécifiques menés sur les enfants de parents drogués. Il en ressort qu’aux Etats-Unis, le rôle des grands-parents varie beaucoup selon les classes sociales. Dans les ghettos, où vivent beaucoup de familles monoparentales, on se serre les coudes entre générations, il existe de vrais mécanismes d’entraide. A contrario, parmi les classes moyennes, où la mobilité géographique est très importante, grands-parents et petits-enfants passent généralement moins de temps ensemble : « Les uns peuvent habiter à Los Angeles, les autres en Floride … du coup, ils se voient surtout à Thanksgiving et Noël », illustre la sociologue.

En France, grâce à une proximité plus forte – Martine Segalen parle de « stratégie résidentielle » – les parents confient plus facilement leurs enfants à leurs grands-parents, en particulier le week-end et pendant les vacances scolaires. La tranche d’âge que constituent les « jeunes vieux » valorise cette relation avec les petits-enfants et y consacre une grande partie de son temps. Les grands-pères, notamment, s’investissent davantage. « Ils ne sont plus les figures patriarcales, éloignées, tutélaires qu’ils ont été », observe la chercheuse. Ils veulent prendre du temps pour leurs petits-enfants et rendre service à leur famille, à leurs enfants et petits-enfants », conclut Martine Segalen.

*Chercheuse au CNRS pendant 30 ans, puis professeure à l’université de Nanterre durant 10 ans, la sociologue et ethnologue Martine Segalen est aujourd’hui directrice de la publication d’Ethnologie française.

 

Usbek & Rica

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